L’amour, ce n’est pas un conte Disney qui commence par des tragédies et se termine par un grand mariage sur fond de “ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants”.
C’est plutôt l’inverse, le mariage (ou pas d’ailleurs) et les enfants (ou pas) et ensuite la tragédie. Pas toujours, bien évidemment, mais quand même. En moyenne, pour 3 mariages célébrés, c’est 1 qui s’arrête, et pour 2 PACS fêtés, 1 qui se rompt. Avec toutes les complications que cela implique. Et on ne compte même pas les unions libres qui vont et qui viennent.
En plus de tout l’aspect émotionnel d’une fin de relation, il y a l’aspect financier. Aujourd’hui, je sors un peu de ma zone de confort pour vous expliquer les tenants et les aboutissants. Le juridique n’est pas franchement ma spécialité, mais j’ai à cœur de vous montrer que non, une relation n’est pas faîte que d’amour et d’eau fraîche et qu’il est nécessaire de parler d’argent au sein de votre couple.
Une relation, c’est comme un immeuble de 146 étages à Tokyo : jamais on ne poserait une pierre sans prévoir des séismes de grande envergure. En amour, il est fondamental de prévoir le pire. Et je vous vois venir les romantiques de la première heure, restez jusqu’à la fin, vous n’allez pas être déçus.
Type d’unions
Je viens de les citer en intro, mais faisons un point détaillé des types d’union qui existent. L’union libre, le PACS et le mariage sont les 3 types d’union qu’on a à notre disposition quand nous sommes en couple, en mars 2022, date à laquelle j’enregistre cet épisode. En général, on commence par l’union libre (sinon, c’est louche), pour éventuellement aller soit vers le PACS, soit le mariage, parfois en passant par le PACS pour ensuite aller vers le mariage.
Tout ce cheminement est principalement fondé sur l’amour, ce qui n’est pas une bonne décision. Je me suis moi-même pacsée par amour avec Chéri et, si ça s’est bien passé pour nous jusqu’ici, c’était une erreur de ne pas avoir parlé de ce sujet-là plus tôt. Heureusement, l’achat de notre maison est rapidement venue appuyer cette décision avec les conseils d’un notaire.
L’union libre
L’union libre est, comme son nom l’indique très clairement, une union libre. Chacun est libre de partir et de venir à sa guise. On l’appelle aussi concubinage, terme que je trouve moche au plus au point. C’était une sous-raison pour moi de me pacsée, je ne voulais plus être une “concubine”. Rien de particulier à dire sur cette union ici, on en reparlera un peu plus tard dans l’épisode.
L’histoire (raccourcie) du mariage
Je parle du mariage avant le PACS, car historiquement, c’est lui qui est apparu en premier. Et biiiiiiien avant le PACS, puisqu’on se mariait déjà en Égypte antique. D’ailleurs, je trouve intéressant de vous faire une très brève histoire du mariage pour savoir de quoi on a hérité aujourd’hui en France.
À mon grand regret, je n’ai rien trouvé de particulier à propos du mariage sur la période gauloise (bon, je n’ai pas cherché longtemps non plus, mon but n’est pas de vous faire une thèse).
Ensuite, on a la période où l’église chrétienne est venue mettre son nez dans les histoires de famille et au Moyen-Âge, le mariage est exclusivement religieux, souvent arrangé entre 2 familles pour unir leurs biens et leurs forces. Les époux ont très rarement leur mot à dire et les mariages d’amour ne font pas légion alors que le sacrement est définitif. Fallait pas tomber sur un conjoint ou une conjointe qu’on ne pouvait pas piffrer.
Le mot mariage n’est pas choisit au hasard, puisqu’il dérive de maris = le mâle. Le mot matrimonial dérive lui de mater, la mère. En résumé, la femme se prépare à devenir mère, à pondre un héritier, en rencontrant un homme. C’est bon, femme, tu vois où sera ta place pour les siècles à venir ?
Durant l’ancien régime, qui durent des années 1500 sous le règne de François 1er jusqu’à la révolution, on voit apparaître des “pré-mariages” devant notaire pour contractualiser les histoires de patrimoines. Comme si certaines familles avaient eu du nez et avaient voulues se prémunir de défaillance ou de coups bas de l’autre partie.
En 1792, soit 3 ans après la révolution, le mariage devient exclusivement civil. Seul le mariage civil en mairie est un acte valable aux yeux de la loi. On rappelle que lors de la révolution, il y a un fort rejet de la religion. Il est même prévu quelques années après que le mariage puisse être dissout lors d’un divorce.
De là et pendant plusieurs siècles, l’institution du mariage a très peu évolué, hormis l’ajustement des différents régimes matrimoniaux qu’on connaît aujourd’hui. Il a également été plusieurs fois remis en question la possibilité de divorcer ou non et les conditions pour le faire, mais le cadre a très peu bougé.
Le mariage d’amour a commencé à se généraliser au cours du 19e siècle.
Dans le début des années 2000, ce n’était pas trop tôt, la femme n’est plus obligée de prendre le nom de son mari et en 2013, ce n’était pas trop tôt non plus, le mariage est ouvert aux personnes de même sexe.
Aujourd’hui, en France, le mariage est donc d’abord une union contractuelle gérée par une institution juridique. De manière facultative et sans incidence sur le contrat juridique, le mariage peut être une union rituelle gérée par une institution religieuse.
L’amour, c’est la cerise sur le gâteau, le truc qui fait que c’est sympa de se marier. Mais ça ne devrait pas être la raison qui nous pousse à nous marier sans prendre le temps de savoir ce qu’on fait d’un point de vue financier et juridique.
L’arrivée du PACS
Créé en 1999, le PACS ou le PActe Civil de Solidarité, est une union civile sous forme de partenariat juridique. Il établit des droits et des devoirs en termes de soutien matériel, de logement, de patrimoine, d’imposition et de droits sociaux. Il ne va pas aussi loin que le mariage, surtout en termes de patrimoine et de possibilité de régimes des biens.
Encore une fois, l’amour, c’est la cerise sur le gâteau.
Au total et d’après l’INSEE, sur les personnes en couple, on a environ 70 % de mariage, 20 % de PACS et 10% en union libre.
Les régimes de biens
Vous avez décidé de vous pacser ou de vous marier ? Chouette ! Sous quel régime ? Question souvent négligée. La plupart des personnes que j’interroge à ce sujet ne savent même pas de quoi je parle, alors que c’est un sujet primordial.
S’il existe des options, ce n’est pas pour rien. Vous n’achèteriez jamais une voiture avec une option inconnue pour vous rendre compte 6 mois plus tard qu’elle vous donne +30% de risque d’aller dans le décor ? C’est pourtant ce que vous faîtes quand vous vous mariez ou pacsez sans prendre le temps de connaître les régimes de biens.
L’amour rend aveugle, dit-on, ceci explique peut-être cela. Mais corrigeons votre vision aujourd’hui.
Tenez-vous bien, on part sur une définition juridique. Un régime de biens, ou régime matrimonial dans le cadre spécifique du mariage, c’est l’ensemble des règles qui régissent les intérêts des conjoints pendant leur vie commune et qui permettent le partage des biens lors de la dissolution de l’union. Comme toute définition juridique, elle est longue, elle est pédante et pourtant, elle est vitale !
On reprend avec des mots plus clairs : ces règles protègent vos intérêts personnels pendant votre union et au moment de la séparation. Oui, vous êtes amoureux, mais vous ne fusionnez pas complètement avec l’autre pour toujours. Vous restez une personne entière, un individu à part entière. Une personne qui a ses propres projets, ses propres rêves. Vous voulez mettre tout ça à la poubelle par peur de perdre en romantisme ? Vraiment ? Allez, je vais vous aidez à décrypter ces régimes.
Pour le PACS, vous pouvez choisir entre 2 régimes : la séparation de biens ou l’indivision.
C’est la séparation de bien qui s’applique par défaut. Dans ce régime, vous restez seul propriétaire des biens que vous aviez avant l’union et si vous acheter seul de nouveaux biens pendant l’union, vous serez également propriétaire tout seul. Je vous l’avoue, c’est mon régime préféré. Ce qui est à moi est à moi, ce qui est à Chéri est à Chéri et si demain on se sépare, chacun récupère ses œufs. C’est mon côté indépendante qui veut cela. Le point positif pour nous, c’est qu’on est complètement raccord sur le sujet.
Dans le cas où vous demandez à choisir l’indivision lors d’un PACS, ce qui est acheté après la signature est commun à 50/50. Vous restez par contre seul propriétaire de ce que vous aviez avant. Vous pouvez opter pour ce régime si vous avez des revenus et aspirations similaires lors de la conclusion du PACS et si vous savez d’avance que vous resterez toujours à égalité tout le long de votre PACS. Ce qui n’est pas vraiment facile à prévoir. Hormis quelques cas particuliers dont il faut parler avec un professionnel du secteur, je vois très peu d’avantages à opter pour ce régime. Et ne me sortez pas “mais je l’aime, ça ne me dérange pas de partager mon patrimoine avec lui / elle”. Vous l’aimez maintenant, mais plus tard vous risquez de vous en mordre les doigts. Et puis je parle de biens, mais pensez aussi que vous partagerez les dettes.
À présent, passons au mariage. On y retrouve la séparation de biens comme pour le PACS. L’indivision devient le régime de la communauté réduite aux acquêts et est très similaire. C’est d’ailleurs ce régime qui est celui par défaut, alors je vous encourage vivement à faire un contrat de mariage avec un notaire.
Il y a également le régime de la communauté universelle. Si vous avez acheté un appartement tout seul lors de votre vie de célibataire, il appartiendra pour moitié à votre époux.se dès la signature du contrat de mariage.
Vous pouvez également opter pour le régime de la participation aux acquêts. Tout au long de votre mariage, vous êtes comme dans la séparation de biens et lors de la dissolution du mariage, on mesure l’enrichissement de chacun et on partage cet enrichissement en 2. Mais si l’un des 2 s’est appauvri, il ne partage pas l’appauvrissement.
⚠️ Gardez en tête que je ne suis pas une professionnelle du milieu juridique, je vous donne juste des pistes de compréhension et de réflexion. Avant de prendre toute décision, il vaut mieux aller voir une personne compétente comme un notaire ou un conseiller en patrimoine.
Prévoir le pire
Maintenant qu’on a balayé les 3 types d’unions et les différents régimes matrimoniaux, on va pouvoir prévoir le pire.
L’illusion de l’amour qui dure toujours
Comme je le disais en intro, on a été biberonné.e aux contes de fée, surtout nous, les femmes. On a ancré en nous qu’il existe pour nous l’homme ou la femme idéal.e, le prince charmant et la princesse à secourir et on a bien appris que “amour” rime avec “toujours”.
Or, si on célèbre chaque année 200 à 220.000 mariages en France pour à peu près autant de PACS, c’est aussi 60.000 divorces et 120.000 ruptures de PACS qu’on enregistre.
Non, l’amour ne dure pas toujours. Et on ne facilite rien avec une absence de communication et une non-écoute de ses émotions. Sans compter que l’amour ne fait pas la relation, mais ça, personne ne nous l’apprend.
C’est quoi, le pire ?
C’est bon, on sait que l’amour et la relation peuvent s’arrêter un jour, alors c’est quoi le pire qui puisse arriver dans ce cas-là ?
Faisons une petite liste non-exhaustive :
- votre conjoint.e part et emporte tout avec lui / elle. Classique des couples en union libre.
- votre conjoint.e disparaît dans la nature, mais vous laisse les meubles. Et aussi les dettes du loyer qu’il ou elle n’a pas payé depuis des mois sans jamais rien vous dire.
- votre conjoint.e vous demande de partir alors que vous n’avez pas de ressources propres. Ici, il n’y a pas de coupable à blâmer, si la personne est dans son logement à elle et ne se sent plus bien avec vous, elle ne va pas vous garder par charité.
- vous avez envie de partir, mais toutes vos ressources sont en commun et vous avez l’impression que vous n’allez pas survivre financièrement sans l’autre. Alors vous restez dans une relation qui ne vous plaît pas et qui parfois peut être toxique.
- vous étiez très bien avec votre conjoint.e, mais sans vous en rendre compte, vous avez glissé.e vers les violences conjugales, qu’elles soient physiques et/ou morales et/ou économiques. Cas de Madame, dans la grande majorité des cas.
- votre conjoint.e décède et vous n’aviez pas réfléchi à cette situation. En plus, il ou elle avait des enfants d’une union précédente. Bonjour la guerre d’héritage.
- vous divorcez et vous vous retrouvez sans rien, car c’est votre conjoint.e qui payait la maison et vous, vous avez payé les courses et l’électricité toute votre vie. Encore le cas de Madame, dans la grande majorité des cas.
- vous vous séparez et vous vous retrouvez sans rien, car vous aviez arrêté votre carrière professionnelle pour vous consacrer au foyer. Encore le cas de Madame, dans la grande majorité des cas.
- votre salaire sert à combler les dettes de votre conjoint.e. Encore le cas de Madame, dans la grande majorité des cas.
- votre conjoint.e décède et vous héritez… des dettes. Encore et encore le cas de Madame, dans la grande majorité des cas
En résumé, Mesdames, l’église du Moyen-Âge nous a bien appris à rester à notre place de mère au foyer soumise à monsieur, Disney nous a appris que l’amour dure toujours, mais quand il s’en va, c’est nous qui payons les pots cassés dans la grande majorité des cas.
S’il est de la responsabilité de tous et de toutes de parler de finances dans notre couple, nous sommes particulièrement bien placées mesdames pour entamer la conversation dans notre propre intérêt. Et comme je sais qu’il y a des hommes qui écoutent ce podcast, osez aborder le sujet avec l’élue de votre cœur.
Comment on parle d’argent dans son couple ?
Il y a quelques semaines, j’ai eu une conversation avec une personne sur Instagram. Quand je lui ai dit que ce n’était pas forcément idéal de tout mettre en commun, elle a réagi très violemment en me disant que si je n’avais pas confiance en mon conjoint, j’avais du soucis à me faire dans ma relation.
C’est typique du syndrome Disney.
Vous savez à qui vous avez à faire aujourd’hui. Vous savez que vous n’avez pas eu de problème dans le passé. Mais à moins d’être devin, vous n’avez pas la possibilité de prévoir les comportements futurs de votre conjoint.e et encore moins les accidents de la vie qui pourraient survenir. Vous n’avez même pas la possibilité de prévoir vos propres comportements futurs.
Combien de personnes ont dit “je promets de te chérir jusqu’à ce que la mort nous sépare” et n’ont jamais tenu cette promesse. Elles étaient pourtant de bonne foi ce jour-là et n’auraient jamais pensé faire du mal (volontairement ou non) à la personne aimée.
Ne mettez pas cette excuse de la confiance en avant pour ne pas aborder les sujets importants. Si vous trouvez qu’avec votre partenaire c’est compliqué, commencez à parler d’argent comme vous parleriez de n’importe quel autre sujet. Dans notre société, l’argent est omniprésent, c’est facile. De l’augmentation du prix de l’essence au financement de vos prochaines vacances, tout est prétexte à parler d’argent.
Ensuite, si vous repérez des points non équitables entre vous, vous pouvez faire écouter cet épisode à votre partenaire de vie et lui demander ce qu’il en pense. Vous pouvez lui proposer de faire un point, de regarder votre situation d’un peu plus près.
Il ou elle sera peut-être réticent.e si ce n’est pas habituel chez vous, mais je suis sûre que vous saurez le ou la mettre en confiance. Exprimez-lui votre besoin de parler de ce sujet.
Et si vraiment il y a une nette opposition, c’est un point de vigilance qu’il ne faut pas négliger.
Pour moi, l’amour ce n’est pas roses, paillettes et licornes. Si, un peu, mais c’est aussi et surtout construire des bases saines et solides en parlant de ce qui est fondamental. L’argent est fondamental. Prévoir qu’on va peut-être se séparer un jour, ce n’est pas casser l’ambiance, c’est être réaliste et vouloir protéger la relation jusqu’au bout.
L’amour, c’est dire à mon mec “aujourd’hui je t’aime et je te promet d’être loyale envers toi jusqu’à la dernière seconde. Je veux prendre soin de toi et de moi jusqu’au jour où tes yeux quitteront mon cœur, que ce soit la mort qui nous sépare ou notre relation qui s’étiole”. Si ça, ce n’est pas romantique, je ne sais pas ce qu’il vous faut.
Faites-vous le plus beau cadeau que vous pouvez vous faire : parler d’argent avec votre amoureux.se. Écoutez ses besoins, exprimer vos peurs. Ouvrez-vous, faîtes preuve de vulnérabilité sur ce sujet capital, c’est comme ça que vous tisserez des liens plus forts.
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